Les organisations sionistes
Les origines du sionisme
En 1896, Theodor Herzl, journaliste viennois, écrit L'État juif. Convaincu de l'impasse de l'assimilation (montée de l'antisémitisme à Vienne, affaire Dreyfus en France, alors que l'égalité des droits civiques est réalisée en Europe de l'Ouest), il popularise l'idée de la renaissance et de l'indépendance du peuple juif sur la terre d'Israël. Il propose la création d'une organisation juive mondiale, destinée à promouvoir l'installation en Palestine. Le premier congrès sioniste international se tient à Bâle en août 1897. La déclaration de Bâle affirme que le sionisme a pour but la création d'un foyer national juif. L'Organisation sioniste mondiale est créée.
C'est dans le judaïsme russe (dont la Pologne, sous domination de la Russie) que l'écho est le plus grand. L'aspiration à une vie plus digne et la montée de l'antisémitisme (l'antisémitisme d'État, fait d'exclusion et de discrimination, relayé par la violence de groupes qui multiplient les pogroms) cristallisent les courants sionistes. La partie de l'intelligentsia qui promouvait la culture hébraïque moderne se mobilise pour la renaissance sociopolitique des Juifs en Palestine1.
Depuis quelques années existait déjà un groupe, Hovevei Tsion (Les amants de Sion), qui, devant la montée de la terreur, préconisait l'établissement d'un foyer national juif.
Le projet de Herzl conduit à la multiplication des rencontres et à la constitution de nouveaux groupes. Le sionisme est non seulement un courant politique, mais aussi le canal de diffusion de la culture hébraïque. Il cherche à donner une identité collective aux Juifs, à fonder culturellement la nation juive moderne, en dehors du cadre religieux. L'organisation des masses juives de la diaspora vise aussi à renforcer leur autonomie culturelle (réseaux d'écoles en hébreu, etc.).
Le sionisme en Pologne
Après 1918, le sionisme disparaît dans la Russie bolchevique mais se développe en Pologne (devenue indépendante et dont les frontières ont été redéfinies), où il forge une identité nationale juive face au nationalisme antisémite.
Le courant des sionistes généraux lutte à la fois pour la création d'un foyer juif en Palestine et pour l'égalité civique des Juifs en Pologne. Le mouvement se fragmente entre sionistes religieux et sionistes laïques, entre sionistes de gauche et de droite.
Les membres de la gauche sioniste tentent de concilier nationalisme juif et idéal socialiste. En restant partisans d'une solution étatique, ils participent à la vie politique : la lutte des classes est la solution au problème social, l'existence étatique est la solution à la question nationale juive. Ils sont nationalitaires dans l'immédiat et nationalistes dans le futur.
« La lutte pour les droits de la nationalité juive dans la diaspora implique nécessairement pour l'avenir un projet de vie nationale en Palestine. La lutte pour la Palestine de demain, de son côté, doit être précédée par la lutte d'aujourd'hui contre toute forme d'oppression et de préjugé, une lutte pour les pleins droits de la nationalité juive. »2
La participation à la lutte locale et la participation à la construction d'un nouveau territoire constituent les deux volets d'action des sionistes socialistes. L'obtention des droits politiques, juridiques et civiques permettra l'existence étatique non territoriale, étape vers la concentration territoriale. L'articulation entre ces différents aspects suscite des divergences et la formation de plusieurs groupes distincts, combinant différemment autonomie nationale politique et autonomie territoriale.
Les sionistes-socialistes sont partisans d'un foyer national juif, mais sans référence à la Palestine. Ils s'opposent à la conception bundiste de l'autonomie nationale culturelle. Mais ils la rejoignent sur le marxisme et le yiddishisme.
Le Poale Tsion (Ouvriers de Sion) fait référence à la Palestine, où « l'ouvrier juif sera le pionnier de l'avenir juif ». Il se définit comme marxiste. Il scissionne entre une composante de droite, qui rejette le marxisme, et une composante de gauche, qui devient le parti le plus dynamique après le Bund. Le DROR en est l'organisation de jeunesse.
Tseirei Tsion (Jeunes de Sion) est partisan d'un socialisme populaire. Il s'inspire des pionniers juifs en Palestine, en particulier du parti Hapoël-Hatzaïr.
L'Hashomer Hatzaïr est un mouvement de jeunesse sioniste et socialiste qui accorde une grande attention à l'éducation, qui rejette ce qui s'apparente à la tradition, qui a de nombreuses activités culturelles et qui prépare la jeunesse à la vie en kibboutz. Il structure la jeunesse en s'inspirant du scoutisme.
Le mouvement Ha-Haloutz (Le pionnier) prépare ses membres au travail agricole pour leur émigration en Palestine. Des groupes de haloutzim se constituent dans toute l'Europe orientale. Ils créent des écoles agricoles, des fermes, des ateliers collectifs, pour former des travailleurs agricoles conscients. Il regroupe surtout des jeunes. Tout en affichant des buts émigrationnistes, il est engagé dans la défense des droits civiques et économiques et mobilise la jeunesse combative3.
Les sionistes révisionnistes sont des sionistes de droite. Ils sont contraints de quitter l'organisation sioniste mondiale parce qu'ils exigent le départ vers la Palestine de tous les Juifs de Pologne et que leur organisation est de type paramilitaire. Le Betar en est l'organisation de jeunesse.
Sources :
Histoire générale du Bund, Henri Minczeles, Austral, 1995.
Mille ans de cultures ashkénazes, collectif, Liana Levi, 1994.
Le Shtetl, la bourgade juive de Pologne, Rachel Ertel, Payot, 1986.
Le pain de misère, histoire du mouvement ouvrier juif en Europe, Nathan Weinstock, La Découverte, 1984.
Site Internet du Centre Simon Wiesenthal. Voir également la page Sur Internet dans la partie méthodologique.